Apollinaire blessé au Bois des Buttes?
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La blessure d’Apollinaire au Bois des Buttes, 17 mars 1916.

Voilà ce que l’on peut lire sur la stèle érigée au Bois des Buttes le long de la route entre La Ville-aux-Bois lès Pontavert et Pontavert :
«En ce lieudit / Le Bois des Buttes / Le 17 mars 1916 fut blessé / Guillaume / APOLLINAIRE / 1880-1918».

A t’il été vraiment blessé au Bois des Buttes? Si la date de sa blessure le 17 mars 1916 est une certitude, connais-t’on le nom de la tranchée et le lieu exact où le drame s’est déroulé?

A la lecture de sa fiche matricule un premier indice vient troubler la lecture; «Blessé à la tête par éclat d’obus à l’Ouest de La Ville au Bois». La stèle est légèrement au sud est de La Ville Aux Bois.

Apollinaire fiche matricule extrait

 

Selon le J.M.O. de la 55e D.I. l’ambulance 1/55 se trouve à Romain (J.M.O. 26 N 369/12 p. 80 )

Le 17 mars 1916, où se trouve Apollinaire à la 6e Cie, ou est-il encore à la 7e Cie ?

Sur cette carte du 1er C.A. de 1915, la position des tranchées françaises sont à la lisière de La Ville-aux-Bois

Carte 1er CA

La Sapinière (extrémité Sud-Ouest) est partie intégrante du Bois des Buttes sans distinction.

Le J.M.O. du 246e RI dresse le bilan de la situation pour le 10 mars 1916.

L’ennemi après un bombardement extrêmement violent à réussi à pénétrer dans le Bois des Buttes et même dans La Sapinière (la distinction est claire) et le Bois Franco-allemand.
La ligne de résistance passe alors par les lisières Nord du Bois Marteau et Bois Clausade ; le boyau de Cettigné, l’intérieur de La Sapinière. Une contre-attaque est organisée pour dégagée La Sapinière et le centre 5 qui tient toujours.
L’heure de la contre-attaque est prévue à minuit, en quelques instants l’ennemi est repoussé hors de La Sapinière, mais ne peut être refoulé d’avantage...
Le centre V (5) est atteint par le 246e RI. il y trouve des éléments du 276e RI.
Le 11 mars, le 246e relève le 276e.

Le 14 mars
Pendant la nuit le 2e Bataillon du 96e RI (commandant PENET ) relève le bataillon BAYON, la relève s’opère sans incident.
Toujours selon le J.M.O. du 246e RI, le 17 mars une grande activité d’artillerie .
L’état des pertes est le suivant :
-Au 246e 1 blessé
-Au 96e 1 lieutenant blessé (certainement Apollinaire)
96e 2 blessés.

Le 23 mars, le Bois des Buttes n’est plus français, Le 25 avril, une offensive d’envergure est menée pour reprendre le bois sans succès. Le Bois des Buttes restera aux mains des Allemands jusqu’au mois d’avril 1917.

Le J.M.O. du 96e RI est pauvre en informations sur la position du 2e bataillon.

Pour le 14 mars le 2e bataillon est mis sous les ordres du colonelcommandant le 246e RI, le 2e bataillon est en 1ére ligne.
Le 15 mars juste un état des pertes :
- BRACHET Jean tué ?
- BESSON Louis tué ?

Le 16 mars 2 blessés.

Le 17 mars est mentionné la blessure d’Apollinaire.

Extrait JMO Apollinaire

 

Le 21 mars 1916 le 2e bataillon est relevé par le 1er.

Le J.M.O. de la 110e brigade pour la journée du 17 mars
-Bombardement de La Sapinière, du boyau de Cettigné et du PC de la brigade Si le J.M.O. de la 109e brigade cite la situation de sa première ligne, la jonction avec la 110e brigade est le boyau de Cettigné.

Témoignage : Les mémoires de la Grande Guerre de Pierre Bellet, adjudant au 96e régiment de Béziers.
Mémoire de Master 1 sous la direction de Rémy Cazals
(Extrait) Bois des Buttes.
BELLET Le 14 mars, nous quittons Villette pour aller en secteur, le 2e bataillon seulement, les autres bataillons restant toujours en réserve d’armée. Nous cantonnons le soir à Meurival et nous en repartons le lendemain matin, pour aller relever au Bois des Buttes.
Les Boches venaient d’attaquer en ce point et avaient réussi un beau coup, puisqu’ils s’étaient
emparés de la presque totalité du Bois des Buttes. Ce secteur était tenu par la 56e DI (246e, 276e etc.) renforcée de territoriaux ; c’était un secteur calme, parfaitement organisé, avec des positions
importantes sous bois d’où l’on avait des vues sur la Ville-aux-Bois occupée par les Boches. Le
secteur était si tranquille, que les occupants s’y étaient installés confortablement. L’attaque boche
n’avait pas été prévue et ne trouva pas de résistance : les soldats furent pris dans les abris et certains
officiers territoriaux durent se sauver dans une tenue sommaire. L’ennemi s’empara de presque tout le bois, ne nous laissant que la dernière butte appelée la Sapinière. Dans cette affaire, les territoriaux y avaient même perdu leurs cuisines roulantes. Dorénavant, ce sont les Boches qui, de leurs nouvelles positions, peuvent très bien voir ce qui se passe jusqu’à l’Aisne.
Telle était la situation lorsque nous avons relevé à La Sapinière. Le bataillon avait comme
consigne d’organiser la nouvelle ligne et de la défendre, pour permettre aux autres unités tenant le secteur et éprouvées par l’attaque boche, de se reconstituer d’abord, et de préparer ensuite une attaque dans le but de reprendre le terrain perdu, car le commandement y attachait une grande importance.
Un peu plus tard, les deux autres bataillons du 96e arrivèrent dans ce secteur et les relèves
s’organisèrent entre les bataillons du même régiment. L'aménagement du secteur et la défense du
terrain se firent rapidement, quoique rendus difficiles par l'eau que l'on trouve tout de suite en creusant. À cause de l’eau, on ne peut creuser d'abris sous terre. Ceux qui existent sont en superstructure et, quoique renforcés par des rondins, n’offrent qu’une sécurité relative.
Or, dans un de ces abris, alors que le 3e bataillon était en ligne, des officiers étaient réunis autour de la table. Un obus pénètre directement dans l’abri par une petite ouverture, éclate, tue 3 officiers ;
un quatrième, le sous-lieutenant ICARD, un ancien camarade du peloton des dispensés, est atrocement blessé mais survivra à ses blessures, malgré l’amputation des deux jambes et d’un bras. Depuis l’attaque boche, ce secteur était devenu agité et le service y était très dur. En certains
points, la tranchée boche n’était qu’à quelques mètres de la nôtre. Cependant, le PC du bataillon, en
arrière de La Sapinière, était bien masqué à la vue des Boches, ce qui nous permettait de sortir de nos abris dans la journée.
Un jour, le vent du Midi se leva subitement et si violent, qu’on en fut presque effrayé. Cette
bourrasque avait surpris les services de l’arrière et rompu les câbles maintenant les saucisses ; nous en vîmes quatre entraînées sur les lignes boches, et de l’une de ces saucisses, un aéronaute se lancer en parachute, mais pour descendre aussi chez les Boches.
Relevés de la première ligne, nous avons été au repos à Romain, au camp de Faité, à Roucy, et en
réserve à Pontavert et au bois de Beaumarais.


Résumé : BELLET est affecté au 96e RI le 1er septembre 1914, dans la 8e Cie du 2e bataillon le même qu’Apollinaire la localisation du bataillon est un peu plus précise La Sapinière (zone humide)

 


La stèle fût élevée non loin de l'endroit où il reçut sa blessure, assortie de cette dédicace : "En ce lieudit / Le Bois des Buttes / Le 17 mars 1916 fut blessé / Guillaume / APOLLINAIRE / 1880-1918".
Né le 26 août 1880 à Rome d'une mère polonaise et d'un père inconnu, Guillaume Kostrowitzky n'a pas la nationalité française quand il veut s'engager en août 1914, De ce fait, sa demande n'est acceptée qu'en novembre, ce qui lance la procédure de naturalisation.
En mars 1916, le poète écrivain, désormais connu sous le nom de Guillaume Apollinaire, se bat au pied du Chemin des Dames, au Bois des Buttes. Dans son carnet de notes, il écrit le 14 mars : « Arrivée dans les tranchée sans abri du bois des Buttes au Nord de Pontavet. » Sa guerre de tranchée ne sera que de courte durée. Un éclat d'obus le frappe en pleine tête le 17 mars. Apollinaire écrit : « Je lisais à découvert au centre de ma section, je lisais le Mercure de France, à 4 heures un 150 éclate à 20 mètres, un éclat perce le casque et troue le crâne. » Il ne voit un médecin que 2 heures plus tard. Les moyens sont rares et l'intervention trop lourde pour être pratiquée dans ces conditions. « On m'endort pour fouiller, l'éclat à enfoncer la boîte crânienne et y est restée, on l'y laisse. » A pollinaire n'est transféré que le 29 mars à l'hôpital du Val-de-Grâce où les chirurgiens procèdent à une trépanation dont il ne se remettra jamais tout à fait.
Guillaume Apollinaire s'éteint le 9 novembre 1918, deux jours avant l'armistice, emporté par la grippe espagnole. Il est reconnu « mort pour la France des suites de ses blessures ».

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